samedi 4 juin 2011

L'utopie, texte de l'émission

L'utopie
Emission "Philosophie", Arte.
Avec le sociologue F. Rouvillois

"Obsession géométrique, soif de l'épure, manie de la règle...
Expression de notre souci de perfection, l'utopie peut se transformer en cauchemar lorsqu'elle saute le pas du réel. Que trahit-elle donc de celui qui la rêve, et du monde qui en rejette la greffe ?"


Utopie : c'est une conjonction du rêve et du projet, du songe et de l'inscription dans le réel.

Thomas More, Utopia : je souhaite que cela se produise, et j'espère que cela se réalisera.

Bacon, La nouvelle atlandide : il veut réaliser cela. Préfiguration des découvertes futures.

Tommaso Campanella, La cité du soleil.
Campanella veut créer une république théocratique, une utopie en acte. Tout sera réglementé, tout est établi en fonction du bien.

idée d'une institution qui va corriger la nature humaine.

1593, Palmanova, cité idéale géométrique = un ville qui a horreur de la nature brute. La nature doit être arraisonnée.

L'homme est-il à la hauteur d'une telle existence ? L'utopie veut conjurer cette médiocrité, mais cela mène toujours à la catastrophe. C'est comme Big Brother d'Orwell. Quand le paradis advient, il devient l'enfer !

Les villes utopiques n'ont jamais une structure organique, mais géométrique. Cela supprime le hasard et conjure la nature. Cette structure peut s'étendre à la terre entière. En ce sens, l'utopie veut réaliser son système. Elle n'est fait uniquement pour les rêveurs.

Google earth : Palmanova existe ! Près de Venise. C'est devenu une ville comme les autres…
Dubaï, polders. Paradis pour riches !

Décalage entre le rêve et la réalité.

Drapeau brésilien. Slogan d'Auguste Comte : "Ordre et Progrès". au bout du progrès, un ordre absolu se réalise. Refus de l'imperfection. La perfection inscrite dans le réel.  Le Brésil a porté de nombreuses utopies (Incas, Jésuites, etc.). Or le Brésil est chaotique dans sa réalité !

Mussolini, lampe de vert en forme de profil continu : on est toujours en face du Duce ! ll nous regarde toujours.
Le fascisme est une utopie qui montre le monstrueux de la réalisation de  toute utopie.
1913, Mussolini crée la revue Utopia.
L'homme est instinctivement mauvais : il faut sans cesse le surveiller et le corriger. On aboutit alors à l'homme nouveau (Campanella, fascisme, marxisme).
Mussolini est ici transparent : idéal de perfection. Regard permanent de l'Etat, surveillance.

Voir Evguéni Zamiatine, Nous autres (1920) : cité en verre. Refus de l'opacité. Moyen de carcéralisation universelle : plus de sphère privée. Tout est soumis au pouvoir.

Voir les le bureaux paysagers en "open space" actuels !

Chute d'un statue de Lénine : l'utopie meure-t-elle ? Ne renait-elle pas de ses cendres ?
L'utopie est une idée fondamentale de notre pensée : idée religieuse au fond. Il y a en ce sens une éternelle utopie.

L'utopie peut-elle exister ? Elle veut exister, à toute force, — mais elle ne peut pas exister ! C'est son drame.

[22:09]


L'utopie prend la forme qui convient au désir L'utopie n'a pas de mémoire. Elle est une conjuration de l'histoire. C'est pourquoi elle peut renaître de ses cendres.

Le goût de l'avenir de l'utopie n'est--il pas une nostalgie de l'avenir ? Vivre le monde dans le regret de ce qu'il n'est pas ?
Non : l'utopie n'est pas un regret, mais un projet de remise en cause du réel et de reconstruction intégrale de la nature  humaine. Elle est dans une agression ! Sinon elle n'est que poésie , — qui n'est peut-être que le seul remède crédible à l'utopie.

"Slogans" :
• L'utopie est une conjonction entre le rêve et l'inscription dans le réel.
• L'utopie ne meurt jamais.
• L'utopie veut exister, mais ne le peut pas.
• L'utopie n'a pas de mémoire.
• Le goût de l'avenir est le propre de l'utopie.
• L'utopie est un projet de remise en cause du réel.